Contes et légendes du Viêt-Nam

Nous ne connaissons pas de société sans légendes, tout comme il n’y a pas de civilisations sans histoires.

Véritable mémoire d’un peuple, précieux héritages du temps passé, les légendes et contes vietnamiens ont nourri notre imaginaire en nous guidant, à notre insu, sur le chemin de la maturité et de l’autonomie, tout en décrivant la société d’antan à travers ses croyances, ses traditions et ses valeurs. Ils nous permettent d’entendre encore s’exprimer avec poésie et imagination nos soucis et espoirs : manger à sa faim, trouver sa place au sein de la communauté, servir dignement son pays.

(Re)Découvrez ci-dessous quelques contes et légendes du Viêt-Nam…


Contes & Légendes autour du Tết

La légende bánh chưng

Le bánh chưng est un gâteau traditionnel de forme carrée, confectionné à la veille du Têt. Dans la recette traditionnelle, il est préparé à partir de quatre ingrédients principaux : du riz gluant, de haricots mungo, de poitrine de porc et enveloppé dans des feuilles de « dong ».

La légende du bánh chưng

Sentant sa fin approcher, le Roi Hùng Vương VI 👑, afin de désigner son héritier, convoque ses fils pour leur demander de lui rapporter des mets précieux pour en faire offrande à leurs ancêtres. Les princes 🤴🏻 se mettent alors en quête, à qui offrira le met le plus rare ou le plus onéreux.

Le prince Liêu, le plus pauvre des enfants et ayant perdu sa mère précocement, était très soucieux de ne pas avoir un met précieux à présenter au Roi.

Un génie lui apparaît alors en rêve, l’emportant dans les airs, au-dessus de ses champs de riz, seule possession lui venant de sa mère, et lui murmure : « Le riz 🍚 est le plus précieux de tous les trésors de la terre. Nul ne se lasse jamais de sa saveur incomparable, qu’on soit pauvre paysan ou riche commerçant, et même roi ».

Suivant ses conseils, Liêu prépara alors un gâteau rond et blanc (bánh dầy) représentant le ciel et un gâteau carré (bánh chưng) représentant la terre 🌏 (qu’on pensait carrée en ces temps-là), à base de riz gluant, de haricots mungo et de viande (symboles des ressources offertes par la nature) et l’entoure de feuilles parfumées 🍃(représentant la nature). Le ciel et la terre symbolisent respectivement le père et la mère, rendant ainsi hommage à la piété filiale (hiếu), trait typique de la culture vietnamienne.

Le roi, conquis par leurs saveurs raffinées et plus encore par leurs valeurs symboliques, fait alors de Liêu son digne successeur.

Depuis ce jour, ces gâteaux sont offerts sur l’autel des ancêtres et dégustés lors des fêtes du nouvel an.


La légende du bánh tét

Tout comme le bánh chưng, le bánh tét est composé des mêmes ingrédients fondamentaux mais ses origines sont étroitement liées à l’Histoire du Vietnam.

Les Vietnamiens du Nord sont particulièrement friands de bánh chưng, ceux du Centre utilisent à la fois le bánh chưng et le bánh tét, tandis que ceux du Sud ont diversifié les gâteaux de riz salés classiques en de nombreuses déclinaisons, allant du salé au sucré.

Les origines du bánh tét

Fin 1788, Nguyễn Huệ se proclame roi 👑 sous de nom de Quang Trung afin de rallier le peuple Việt et lève ses troupes pour lutter contre l’armée Qing occupant le Nord, sous prétexte d’aider la dynastie des Lê à reconquérir le royaume.

L’armée était vaillante mais populaire, et les hommes devaient accepter de partir en campagne durant la période du Tết. Les troupes devaient pouvoir se déplacer rapidement, par voie terrestre ou par voie maritime, de Bình Định à Thăng Long.

En fin stratège 💡, La Sơn Phu Tử, de son vrai nom Nguyễn (Quang) Thiếp, conseiller du roi Quang Trung, propose de modifier la forme traditionnellement carrée du gâteau de riz (bánh chưng) enveloppé dans des feuilles de « dong », en un long cylindre enveloppé de feuilles de bananier (lá chuối), tout en conservant les éléments fondamentaux que sont le riz gluant, les haricots mungo et la viande de porc. De cette adaptation pratique* est né le « bánh tét ». De cette façon, les soldats pouvaient conserver soigneusement le bánh tét et le consommer petit à petit.

Suivant ces conseils avisés, les gâteaux de riz sont préparés par les familles sur ordre du roi Quang Trung. Les bánh tét ainsi confectionnés et attachés autour de la taille, les troupes du roi Quang Trung prennent alors la route, marchant jour et nuit, emportant ainsi avec eux l’esprit du Tết et la chaleur de leur foyer.

En se servant de la mobilité de son armée face à l’immobilité de celle des Qing, le roi Quang Trung réussit à vaincre ses adversaires en un temps record en reprenant la capitale Thăng Long dans la nuit, à la veille du Tết Kỷ Dậu (1789), conquérant ainsi l’indépendance du pays.

Note aux lecteurs 📖 : (*) Le mot « tét » signifie, dans ce contexte, couper ou fendre mais l’outil traditionnel utilisé ici est une fine tige en bambou servant à emballer les gâteaux de riz. Le bánh tét est enveloppé dans des feuilles de bananiers disposées dans le sens des fibres, afin de pouvoir être tranché facilement, rondelle après rondelle, à l’aide d’un fil.


La légende du Mât du Tết

Lorsque le Tết arrive, un mât rituel, ou Cây nêu 🎋 en vietnamien, protecteur de la famille, est érigé dans certaines régions du Vietnam, plus particulièrement dans les zones rurales et montagneuses. Il symbolise le bonheur, la santé, la vie paisible pour le foyer durant les premiers jours de l’année lunaire 🌕.

Selon la coutume, il s’agit d’une longue perche, de 5 à 7 mètres, d’un type de bambou particulier. Le bambou symbolise très justement la vitalité, la souplesse et la résistance.

La légende du Mât du Tết

La semaine précédant le Tết, les Génies du Foyer rejoignent l’Empereur de Jade. Profitant de l’absence des génies, les démons 👹, les mauvais esprits, les fantômes 👻, pour un temps libérés de toute surveillance, se hâtent parmi les vivants, cherchant à leur nuire. C’est pourquoi durant cette période, un mât est érigé devant les maisons afin de les éloigner.

Il est décoré de différents objets selon les us et les coutumes de chaque région. Tout ce qui y est attaché symbolise des vœux 🎋 de bonheur, de santé et de paix. Par exemple, les plaques décorées appellent le bonheur pour la famille, la branche de banian, la chance et la longévité, des plumes de poulet symbolisent l’oiseau sacré qui apporte toujours son aide à l’homme, un rond de papier rouge représente le Soleil, la cime étant la place où l’oiseau sacré, l’Ambassadeur du soleil, s’arrête. On y accroche une lanterne🏮à son sommet pour que les ancêtres puissent retrouver le chemin du foyer pour célébrer le Tết avec leurs descendants.

Le mât protecteur 🎋 est enlevé au septième jour qui suit le Tết, les génies du Foyer étant revenus assurer entre temps la protection de la famille.


La Course Céleste ou la légende des 12 animaux du zodiaque vietnamien

Utilisé pour calculer l’année lunaire, le zodiaque vietnamien est constitué de douze signes représentés chacun par un animal : le rat 🐀 (« Tý »), le buffle 🐃 (« Sửu »), le tigre 🐅 (« Dần »), le chat 🐈 (« Mão/Mẹo »), le dragon 🐉 (« Thìn »), le serpent 🐍 (« Tỵ »), le cheval 🐎 (« Ngọ »), la chèvre 🐐(« Mùi »), le singe 🐒 (« Thân »), le coq 🐓 (« Dậu »), le chien 🐕 (« Tuất »), puis enfin le cochon 🐖 (« Hợi »).

La Course Céleste ou la légende des 12 animaux du zodiaque vietnamien

Selon la légende (et il en existe plusieurs variantes!), l’Empereur de Jade invita tous les animaux à venir le rencontrer et ainsi leur faire partager ses observations pour la nouvelle année.

Seuls douze animaux répondirent présents. Pour les récompenser de leur bonne volonté, il leur donna le pouvoir de gouverner chacun des signes du zodiaque selon leur ordre d’arrivée.

Matinal, le rat fût le premier à se mettre en route en direction de la porte céleste. Sur son chemin, une rivière l’obligea à s’arrêter en raison de son fort courant. Après avoir patienté un long moment, il se jeta sur le dos du buffle qui s’apprêtait à traverser. Le buffle, n’y voyant aucun inconvénient, continua imperturbable, sa traversée. Arrivés au niveau du palais de l’empereur de Jade, le rat se jeta soudainement au pied de l’empereur devançant ainsi le buffle et gagnant, de fait, la première place.

Le tigre et le chat arrivèrent, respectivement, à la troisième et à la quatrième place, le chat s’aidant des pierres de la berge et d’un rondin flottant sur l’eau pour traverser de la rivière. Le dragon arriva en cinquième position, suivi du serpent. Arrivèrent, ensuite, le cheval et la chèvre suivis par le singe à la neuvième place. Enfin, le coq, le chien et le cochon arrivèrent derniers.

Variante vietnamienne. Les Vietnamiens parlent du signe du « chat » 🐈 et non du « lapin » 🐇 (utilisé par les Chinois), du fait de la prononciation sino-vietnamienne. La prononciation chinoise distingue de peu (seule l’intonation change) les mots « lapin » et « chat ». Avec la prononciation vietnamienne, le son fait référence au mot « chat » en vietnamien.


Contes & Légendes autour du Tết Trung Thu (Fête de la lune ou de la mi-automne)

La légende de la Déesse de la Lune 🌕 (Hằng Nga)

La légende de la déesse de la Lune appelée Hằng Nga (ou encore Chị Hằng) est souvent associée à la fête de la Lune (célébrée le 15ème soir du huitième mois selon le calendrier lunaire).

La légende de la Déesse de la Lune 🌕 (Hàng Nga)

Autrefois, dix soleils ☀️ s’élevaient dans le ciel, causant une sécheresse intense, brûlant toutes potentielles récoltes et rendant impossibles les moissons 🌾.

Un jeune chasseur, Hậu Nghệ, monta un jour au sommet de la montagne Côn Lôn ⛰ grâce sa force herculéenne. Avec son arbalète 🏹 magique il tira neuf flèches et fit tomber neuf astres. Il laissa le dixième soleil réchauffer doucement la Terre 🌏 et les récoltes 🌾.

Pour le récompenser, la dame céleste lui offrit deux pilules ayant le pouvoir de rendre immortel celui qui les prendraient.

Le jeune homme confia ce précieux tribut à sa femme, Hàng Nga, qui le dissimula dans sa coiffeuse. Alors qu’elle était seule, un individu pénétra dans leur demeure pour tenter de dérober les pilules, mais elle les avala avant qu’il ne s’en empare.

Immortelle et transportée au ciel, la jeune femme demanda à la dame céleste de la ramener au plus près de son mari resté sur terre. La lune 🌙 était l’endroit le plus proche.

A chaque mi-automne, tandis que la lune 🌕 brillait au plus fort, le jeune chasseur déposait les offrandes sucrées 🥮 et les fruits préférés de sa femme envolée pour lui témoigner son amour éternel.


Cuội, le garçon de la lune 🌕 (Chú Cuội)

L’autre légende associée à la fête de la Lune (célébrée le 15ème soir du huitième mois selon le calendrier lunaire) décrit l’histoire de Chú Cuội, le gardien de buffles qui flotta malencontreusement vers la Lune en essayant de retenir un arbre banian sacré. Les jours de pleine lune, les enfants peuvent apercevoir une tâche noire sur la lune représentant Chú Cuội et son arbre guérisseur.

Chaque année en allumant leurs lanternes et en participant à la procession, les enfants montrent ainsi le chemin du retour vers la Terre à Cuội.

Cuội, le garçon de la lune 🌕 (Chú Cuội)

Un jour, Cuội, modeste gardien de buffle, tomba sur une portée de jeunes tigres en forêt. En voulant s’amuser avec eux, il les tua accidentellement. En entendant le grognement de la mère 🐅 non loin, et pris de panique, il grimpa dans un arbre.

La tigresse, constatant la mort de ses petits, se précipita en contrebas. Cuội la vit alors attraper les feuilles d’un arbre. Revenue auprès des cadavres de ses petits, elle mâcha les feuilles 🍃, et mit la bouillie dans leurs bouches. Les petits revinrent alors à la vie, comme par miracle. Cuội attendit longtemps avant de quitter sa cachette et alla examiner de plus près l’arbre miraculeux. Il décida alors d’emporter avec lui, une branche.

Sur le chemin du retour, il aperçut le corps sans vie d’un vieil homme. Il mâchouilla alors quelques feuilles 🍃 de sa branche et les glissa dans la bouche du vieillard, qui ressuscita miraculeusement. Devant les explications de Cuội, le vieil homme lui confia avoir entendu parlé de cet arbre, un Banian, qui possède le don de redonner la vie à quiconque en ingère les feuilles 🍃. Il conseilla à Cuội d’en prendre grand soin : « Souviens-toi de ne jamais l’arroser avec de l’eau sale, ou il s’envolerait vers le ciel… ».

Une fois rentré, il planta la branche, et veilla sur elle jour et nuit, si bien qu’elle devint un rapidement un bel arbre 🌳. Dès lors, Cuội commença alors à accomplir des miracles en sauvant quantité de personnes malades, grâce aux feuilles 🍃.

Un jour, dans le village voisin, Cuội fut appelé par un riche vieil homme pour sauver sa fille unique, lui promettant de lui offrir en retour tous ses biens. Une fois la jeune fille sauvée, Cuội l’épousa.

Un jour, en son absence, des individus malintentionnés s’introduisirent chez lui et tuèrent sa femme. Un fois rentré, Cuội n’eut aucun mal à la ramener à la vie. Pour le mettre une nouvelle fois à l’épreuve, ces mêmes individus revinrent, et cette fois, prirent soin de jeter au loin les viscères de la pauvre épouse. À son retour, Cuội ne sachant plus que faire n’eût de choix que de prélever les intestins de son chien 🐕, ressuscité précédemment, pour en faire ceux de sa femme, afin de pouvoir lui faire ingérer la bouillie de feuilles mâchées 🍃. Une fois sa femme sauvée, Cuội tenta de ressusciter son fidèle compagnon 🐕 en lui fabriquant des boyaux d’argile. Une fois de plus, les feuilles miraculeuses ramenèrent l’animal à la vie.

Les années passant, Cuội ne pouvait que constater la confusion qui gagnait insidieusement sa femme, conséquence de ce morceau d’intestin de chien qu’elle avait reçu. Cuội ne cessait de recommander à sa femme d’éviter à tout prix de souiller l’arbre précieux 🌳.

Mais un jour, en allant vider les ordures, elle eut la vile idée de les jeter au pied de l’arbre. Aussitôt, l’arbre s’arracha de terre et commença à s’élever dans les airs. Ne sachant comment le retenir, Cuội n’eut que le temps de planter dans le tronc la hache 🪓 qu’il tenait à la main et de s’y agripper comme il put. L’arbre continua toutefois de s’élever de plus en plus haut et de plus en plus vite. Bientôt, il atteignit la Lune 🌙 avec le pauvre Cuội toujours accroché à son tronc.

Depuis, Cuội, assis sur la Lune 🌙 au pied de son arbre, attend l’occasion de redescendre sur Terre.


Contes & Légendes autour des figures emblématiques vietnamiennes

L’histoire des sœurs Trưng (Hai Bà Trưng)

Les femmes vietnamiennes 👩🏻 sont sur tous les fronts, occupant un rôle prépondérant tant dans la famille que dans la société vietnamienne. Certaines ont marqué l’Histoire du Vietnam par leur résilience et leur bravoure. Aujourd’hui encore leurs exploits sont contés de génération en génération.

Les sœurs Trưng ou Hai Bà Trưng (littéralement « les 2 dames Trưng ») sont considérées comme les héroïnes d’une rébellion contre la première domination chinoise du pays.

L’histoire des sœurs Trưng ou Hai Bà Trưng

Les deux sœurs 👭🏻, Trưng Trắc (l’aînée) et Trưng Nhị (la cadette), nées au sein d’une famille de militaires, ont été initiées aux arts de la guerre ⚔️ dès leur enfance.

A l’époque, le Vietnam subit la domination chinoise. Les injustices ⚖️ et les répressions imposées à la population se font de plus en plus nombreuses. Thi Sách, le mari de Trưng Trắc, s’oppose à cette assimilation chinoise et fut exécuté par les Chinois pour exemple. La mort de Thi Sách marque le point de départ d’une révolte populaire, menée par les deux sœurs.

Après avoir repoussé hors de leur village une unité chinoise (39 après JC), les sœurs Trưng réussissent à lever une armée composée essentiellement de femmes 🙋🏻♀️, parvenant ainsi à libérer le nord du pays en seulement quelques mois. Régnant sur la partie libérée, elles repoussent leurs ennemis pendant près de trois ans.

Malheureusement, en dépit de nombreux faits héroïques, l’armée vietnamienne est finalement défaite (en 43 après JC), et le pays retombe à nouveau entre les mains chinoises.

Selon la légende, pour ne pas tomber vivantes dans les mains de leurs ennemis, les sœurs Trưng se donnent la mort en en se jetant dans la rivière Hát Giang. Le destin du Vietnam fut toutefois indéniablement marqué par l’histoire des soeurs Trưng, éveillant 🔥 par leur rébellion, esprit d’indépendance et résilience, traits si caractéristiques des Vietnamiens.


La légende de Lạc Long Quân & Âu Cơ

Giỗ Tổ Hùng Vương (ou fête des rois Hùng), premiers rois 👑 du Viêt-Nam, a lieu tous les 10ème jour du 3ème mois lunaire. Symbole de la conscience de l’histoire vietnamienne et du respect des ancêtres, cette fête souligne la solidarité entre les ethnies vietnamiennes.

(Re)Découvrez l’histoire de Lạc Long Quân, héros légendaire du Viêt-Nam, qui par son mariage avec Âu Cơ, marqua le début d’une lignée, liant les habitants des montagnes ⛰ à ceux vivants près de la mer 🌊.

Cette légende est à l’origine du proverbe « Con Rồng 🐲, cháu Tiên » (Enfants de Dragon, petits-enfants de Fée/Immortelle), rappelant à chaque vietnamien son ascendance légendaire.

La légende de Lạc Long Quân & Âu Cơ

Fils d’un dieu de la montagne (par son père) et d’un dragon de mer (par sa mère), Lạc Long Quân possédait une force herculéenne 🏋🏻. Lorsque Lạc Long Quân monta sur le trône , il décida de parcourir le pays, voulant remédier aux tensions entre les habitants des montagnes du nord, et les habitants des basses terres du sud. Grâce à ses pouvoirs et son intelligence, Lạc Long Quân a réussi à vaincre trois des monstres les plus terrifiants de son époque.

Ngư Tinh, le premier des trois était une sorte de poisson, tuant et terrorisant de nombreux marins. Lạc Long Quân réussit à le vaincre, puis le coupa en trois morceaux. La tête du monstre est devenue le sommet d’une montagne, sa queue s’est transformée en une plage sur l’île Bạch Long Vĩ.

Hồ Tinh, le second monstre, vivait sous une montagne, à l’ouest de Hà Nội. Ce renard 🦊 à neuf queues, attirait des jeunes femmes à l’intérieur de sa grotte, pour les torturer et les dévorer. Après trois jours de bataille, le monstre fut tué par Lạc Long Quân. Selon la légende, il inonda ensuite la région entière, donnant ainsi naissance à l’actuel lac de l’Ouest à Hà Nội (Hồ Tây).

À Phong Châu (actuel Việt Trì, au nord-ouest de Hà Nội), le dernier monstre, un esprit maléfique jouait des mauvais tours aux habitants. Incapable de le vaincre malgré une bataille acharnée de cents jours, Lạc Long Quân usa de la ruse pour l’effrayer et le chasser. Après le départ de Lạc Long Quân, les montagnes du nord ont été envahies par un seigneur du nord. Les habitants, opprimés, enjoignirent Lạc Long Quân de revenir les aider.

Répondant à leur appel, Lạc Long Quân revint et rencontra la fille du chef, Âu Cơ, une princesse immortelle. Elle tomba amoureuse❣️de Lạc Long Quân et partit avec lui vivre dans son palais situé au sommet d’une montagne ⛰. Son père essaya de se battre pour le retour de sa fille mais resta impuissant face à la force Lạc Long Quân, qui réussit à repousser l’envahisseur. Plutôt que de donner naissance à des enfants, Âu Cơ 🤰🏻donna naissance à un sac contenant cent œufs. Les cents enfants atteignirent l’âge adulte en peu de temps.

Lạc Long Quân dit alors à sa compagne qu’ils ne pourraient continuer à vivre ensemble, leurs traditions et coutumes étant trop différentes, le feu 🔥 et l’eau 💧ne pouvant se mélanger. Ainsi, ils se séparèrent, en se jurant entraide mutuelle. La moitié des enfants suivirent leur mère dans les montagnes, tandis que l’autre moitié accompagnerait leur père vers les basses terres maritimes.

Selon la légende, le fils aîné, parti avec sa mère, commença à régner sur Văn Lang (ou Lạc Việt) (2888 av. J.-C.), devenant ainsi le premier roi Hùng Vương, fondateur de la dynastie 👑 Hồng Bàng, qui régna jusqu’en 258 av. J.-C. Dix-sept rois portant le nom de Hùng Vương🤴🏻lui auraient ensuite succédé.


Contes & Légendes autour des animaux

Le Génie de la Pluie 🌧 et la Grenouille 🐸

Pourquoi les grenouilles annoncent-elles la pluie ?

Le Génie de la Pluie 🌧 et la Grenouille 🐸

Mưa (*), génie de la pluie 🌧 , dragon 🐉 capricieux et paresseux, s’était vu confié par l’Empereur de Jade la tâche d’arroser la terre, en avalant la mer et en recrachant l’eau 💦 sous forme de pluie. Il pouvait toutefois recracher l’eau sur une seule région, ou paresser des semaines durant, provoquant ainsi inondations ou sécheresse.

Un jour, tandis que tous les animaux s’étaient résignés, la grenouille 🐸 partit se plaindre auprès de l’Empereur de Jade. En chemin, elle rencontra le crabe 🦀 , le renard 🦊 , l’ours 🐻, le tigre 🐯 et l’abeille 🐝 qu’elle convainquit de l’accompagner, l’union faisant la force 🔗. En arrivant aux portes du palais, la grenouille 🐸 demanda à ses compagnons d’aller se cacher avant de frapper sur le tambour céleste dont quiconque s’estimait victime d’une injustice pouvait se servir.

Seul le dragon Mưa était présent au palais. « Qui ose ainsi troubler mon repos ? », gronda le dragon. « Tu ne fais pas ton travail et je suis venue m’en plaindre », répondît la grenouille.

La grenouille tambourina de nouveau pour faire revenir le maître du ciel. Furieux, le dragon Mưa ordonna au coq 🐓 céleste de punir la grenouille effrontée. Aussitôt, le renard 🦊 accourut pour le mettre en fuite. Le dragon envoya ensuite le chien 🐕 céleste, mais l’ours sortit de sa cachette pour le griffer. Profitant de ce répit, la grenouille tambourina, encore et encore. Le dragon envoya alors le serpent 🐍 . L’abeille surgit et le piqua, et en s’approchant de la mare, le crabe le pinça. En revenant jusqu’au palais, l’ours et le tigre se jetèrent sur lui.

La grenouille continuait à frapper le tambour si fort que l’Empereur de Jade l’entendit à l’autre bout du monde et rentra. « Que se passe-t-il donc ici ? Qui endure une injustice à ce point insupportable ? ». « Pardonnez-moi pour tout ce vacarme », dit la grenouille. Et n’écoutant que son courage, elle exposa la situation.

Le dragon Mưa fut sommé de redescendre sur la terre afin de l’arroser. L’Empereur de Jade dit ensuite à la grenouille : « Si Mưa commet d’autres négligences, plutôt que de semer la panique dans mon palais, coasse le plus fort possible, et il comprendra… ».

Encore aujourd’hui, quand il fait trop sec, les grenouilles 🐸 coassent pour que Mưa, le génie de la pluie, n’oublie pas sa promesse…

(*) « Mưa » en vietnamien signifie « pluie ».


La légende de l’épée restituée

La tortue 🐢 fait partie les 4 animaux sacrés dans la croyance populaire vietnamienne (avec le dragon, la licorne et le phénix). Elle est l’emblème de la force et de la longévité.

Sa carapace symbolise la voûte céleste et ses 4 pattes sont les 4 piliers du monde. La tortue est considérée comme un véritable fil reliant le Ciel et la Terre.

La légende de l’épée restituée

Un matin, durant la domination chinoise, un pauvre pêcheur 🎣 tira des eaux, une barre de fer dans ses filets. Il la rejeta à l’eau par deux fois, mais elle se retrouva systématiquement dans ses filets. Intrigué, le pêcheur s’aperçut alors qu’il s’agissait en réalité d’une véritable épée 🗡, bien que dénuée de poignée. Après avoir rangé la lame dans sa hutte, le pêcheur décida de rejoindre les troupes du seigneur Lê Lợi pour combattre à ses côtés.

Durant une halte chez le pêcheur, Lê Lợi remarqua, comme aimanté, l’épée qui brillait et sur laquelle étaient gravés ces mots : « Par la volonté du ciel ! ». Il la garda alors avec lui. Quelques temps plus tard, au détour de son chemin, Lê Lợi trouva en haut d’un banian, une poignée incrustée de jade.

Lame et poignée alliées 🗡, cette épée décupla l’ardeur et la force des troupes, qui repoussèrent avec succès l’envahisseur chinois.

Quelque temps après, Lê Lợi devenu l’Empereur Lê Thái Tổ, se promenait sur le Lac, lorsque soudain une tortue d’or 🐢 fit surface pour lui réclamer l’épée au nom du Roi-Dragon, ancêtre mythique du peuple viêt.

Lê Lợi comprit alors que l’épée était un mandat du Ciel destiné à chasser les envahisseurs du pays.

Depuis ce jour, le lac prit le nom de « Lac de l’Épée Restituée » (Hồ Hoàn Kiếm). Le temple (Đền Ngọc Sơn), érigé au centre du lac, rend hommage à la Tortue d’Or.


La légende de la carpe

La carpe se transformant en dragon est une légende vietnamienne et de certains autres pays orientaux. Elle symbolise notamment le succès, la richesse, et la résilience pour surmonter les difficultés.

La légende de la Carpe

« Chaque année à la saison des pluies 🌧, l’Empereur de Jade ordonnait aux dragons de faire jaillir de l’eau sur la terre pour permettre aux paysans de planter du riz 🌾. Comme les dragons n’étaient pas nombreux, ils avaient bien du mal à honorer leur tâche. C’est ainsi que les Paysans durent plusieurs fois supporter des sécheresses 💥 de plusieurs années.

Un jour, l’Empereur de Jade convoqua tous les animaux de l’océan : ceux qui seront capables de sauter par-dessus trois portes de pluie seront transformés en dragon 🐲.

Le premier ayant tenté sa chance était un poisson 🐟. Cependant, celui-ci réussi uniquement à passer la première porte. Le deuxième à essayer était un poisson-chat. Malheureusement, il se cogna la tête sur la seconde porte. C’est pourquoi le poisson-chat a une tête aplatie et l’empereur le récompensa avec des moustaches de dragon pour l’effort.

La crevette fut plus talentueuse, elle passa sans encombre les deux premiers et déjà les effets de la transformation en dragon se firent sentir. Les écailles lui couvrirent le corps, des pinces lui poussèrent sur la tête, mais lors du troisième saut elle échoua et retomba à la renverse si durement qu’elle planta la tête dans le sol, ses entrailles lui remontèrent à la tête et son dos resta courbé à tout jamais 🦐.

Puis vint le tour de la carpe. Elle prit son élan et franchit d’un seul trait les trois échelons de vagues. Alors elle traversa en vainqueur la Porte de « Vũ Môn » ⛩ et se transforma en dragon 🐉 comme promis.

Les carpes symbolisent ainsi le succès, l’assiduité et la richesse. Par ailleurs, l’éducation au Viêt-Nam est symbolisée par trois portes.


Contes & Légendes autour des fruits

La légende du carambolier d’or

Le phénix, l’un des 4 animaux sacrés vietnamiens, symbolise la grâce, la vertu et la fierté mais aussi la renaissance, la régénération et la survie. Il n’apparaît que dans des temps calmes et prospères, symbolisant ainsi la paix.

La légende du carambolier d’or ✨

À la mort de leur parents, deux frères se partagèrent l’héritage. L’aîné, cupide et avare, s’empara de tous les biens et laissa à son cadet et à sa femme une paillote délabrée et un carambolier 🌳 aux fruits rabougris. Se contentant de leur sort, ces derniers prenaient soin de leur carambolier de sorte que l’arbre 🌳 reprit vigueur et donna quantité de fruits.

À mesure que les caramboles mûrissaient, un oiseau d’une taille extraordinaire 🐦 vînt chaque matin en manger. L’épouse navrée se lamentait 🙍🏻♀️: « Pauvres que nous sommes, nous comptons sur ce que nous rapporte le carambolier et voilà que l’oiseau ravage tout. ». L’oiseau l’entendit et répliqua : « Des caramboles je mange, de l’or 💰 je rends, munissez-vous d’un sac de trois livres et attendez-moi. ».

Dans l’attente de son retour, le couple cousit un sac selon les indications données. Quelques jours plus tard, l’oiseau 🐦 revînt inviter l’époux à prendre place sur son dos. L’oiseau le transporta sur une île déserte 🏝 remplie d’or et de pierres précieuses 💎. Libre d’en prendre autant qu’il pût, il remplit son sac 💰 et l’oiseau le ramena chez lui.

L’aîné et son épouse, surpris devant leur richesse soudaine, les questionnèrent. Son cadet, honnête et franc, lui raconta l’histoire de l’oiseau géant 🐦 et de l’île 🏝. Le couple aîné leur proposa alors d’échanger toute leur fortune contre la paillote et le carambolier.

Quelque temps plus tard, l’oiseau revint manger des fruits et fit la même recommandation : un sac de trois livres pour aller chercher de l’or. Cupide, l’aîné emmena deux sacs de six livres chacun et une fois sur place les remplit. Sur le chemin de retour, plié sous le poids de son chargement, l’oiseau tangua, si bien que l’aîné tomba dans la mer, entraîné par ses deux sacs remplis d’or 💰💰 et de pierres précieuses 💎.

Note aux lecteurs : la carambole est un fruit exotique facilement identifiable par sa forme étoilée ⭐️ une fois tranché.


La légende de la pastèque

La pastèque 🍉 est un fruit traditionnel du Tết, synonyme d’abondance. Elle fait l’objet d’une légende bien connue des vietnamiens.

La légende de la Pastèque

Sous le règne du Roi Hùng Vương XVII 👑, le commerce avec les marchands étrangers est florissant. Se prenant de pitié pour un jeune garçon enlevé sur une île des mers lointaines qui accompagnait les marchands, le Roi garde l’enfant à la cour. Celui-ci étonne par son intelligence et ses capacités. Le roi le nomme Mai An Tiêm et lui donne pour épouse sa propre fille.

Ce privilège ne manque pas d’éveiller la jalousie des mandarins de la cour. Mis en garde par sa femme, Mai An Tiêm se contente à chaque fois de répondre d’un ton tranquille: « Ma vie et tous mes biens, je les dois au Ciel… ».

Un courtisan jaloux, surprenant l’une de ces conversations, s’empresse de la rapporter au Roi. Furieux, le roi fait amener Mai An Tiêm et lui dit : « Je n’ai qu’une seule et unique question à te poser. Dis-moi à qui tu dois tout ce que tu possèdes ! ». « Au Ciel », répond Mai An Tiêm sans malice.

Sur les conseils des mandarins, le Roi décide en guise de punition d’envoyer Mai An Tiêm sur une île déserte 🏝. Le Roi consent à contrecœur à laisser la princesse et ses enfants accompagner ce dernier. Arrivé sur l’île, le couple ne perd pas espoir et s’emploie à trouver les ressources nécessaires à leur survie.

Un jour, Mai An Tiêm remarque un oiseau 🐦 qui fait trois fois le tour de l’île avant de venir lâcher au-dessus de lui six graines noires et brillantes. Très vite, les graines, une fois plantées, laissent place à de jeunes pousses vertes 🌱 qui se mettent rapidement à fleurir 🌼, pour donner ensuite de gros fruits ronds d’un beau vert foncé. Mai An Tiêm continue de semer toutes les graines nouvellement obtenues. Il ne fallut pas longtemps pour que l’île entière ne devienne un champ de pastèques !

Quelque temps plus tard, une jonque 🛶 accoste sur l’île. Les passagers, stupéfaits à la vue des champs, goutent volontiers les fruits 🍉. Avec sa bonté coutumière, Mai An Tiêm en offre aux marchands. De retour au Royaume du Sud, l’un d’entre eux se présente au palais et en offre au roi, en lui expliquant qu’elles proviennent d’une île où un jeune couple a réussi à vaincre l’adversité en la cultivant.

Conquis par la saveur de la pastèque 🍉, le roi demande à ce qu’on lui amène ce couple si courageux. Quand il voit devant lui Mai An Tiêm et sa fille, le roi, pris de remords, décide de leur pardonner. Mai An Tiêm retrouve ainsi sa place au palais royal, faisant ainsi cesser toute jalousie.


Contes & Légendes, les grands classiques…

Tấm Cám ou la Cendrillon vietnamienne (1/2)

L’histoire de « Cendrillon » se retrouve dans les contes et légendes du monde entier. Toutefois, dans la version vietnamienne, l’histoire ne s’arrête pas au mariage de l’héroïne…

Retrouvez ici, la première partie de son histoire…

Tấm Cám ou la Cendrillon vietnamienne

Il était une fois deux petites filles, Tấm et Cám, sa demi-sœur. À la mort de leur père, la mère de Cám se montra cruelle envers sa belle-fille, lui donnant mille corvées, tandis qu’elle gâtait Cám.

Un jour, elle promis un couvre-sein (« yếm ») à celle qui lui ramènerait une nasse pleine de crevettes 🦐. Tấm eut rapidement fait de remplir la sienne, au contraire de sa sœur. Celle-ci dit à son aînée : « Oh, sœur aînée Tấm, tes cheveux sont sales. Plonge dans l’étang te laver, ou Mère te réprimandera ». Tấm le dos tourné, Cám en profita pour transvaser le contenu de sa nasse dans la sienne avant de se sauver.

À son retour, ne lui restant plus aucune crevette, Tấm se mit à pleurer. Bouddha apparut : « Cesse de pleurer, mon enfant. Regarde ce qui reste dans ton panier. » Seul demeurait un petit goujon 🐟. Bouddha lui dit : « Porte-le dans un puit et donne-lui deux fois par jour un peu de ton riz 🍚», en lui apprenant alors la formule pour l’appeler.

Un jour, Cám surprit sa sœur en train de jeter du riz dans le puit et appeler le goujon. Elle courut en informer sa mère. Le lendemain, celle-ci demanda à Tấm de mener les buffles 🐃 paître dans des champs lointains. Une fois Tấm partie, la mère appela le goujon 🐟, l’attrapa puis le mangea avec Cám.

À son retour, le goujon ayant disparu, Tấm se mit à sangloter. Bouddha apparut de nouveau : « Cesse de pleurer, mon enfant. Ton goujon a été mangé. Ramasse ses arêtes et place-les dans quatre petits pots que tu enterreras sous chaque pied de ton lit. » Alors que Tấm cherchait les arêtes, une poule 🐓se mit à caqueter : « Donne-moi une poignée de paddy et je gratterai le sol pour retrouver les arêtes ! » Ces dernières furent retrouvées parmi les cendres de la cuisine et Tấm suivît les instructions.

Les années passèrent. Tấm travaillait de plus en plus dur, alors que Cám se complaisait dans l’oisiveté et la paresse.

Un jour, la nouvelle d’une fête organisée par le Roi 🤴🏻se répandit. Le jour de la fête, la marâtre renversa sur une natte un mélange de paddy et de riz décortiqué, et dit à Tấm : « Tu n’iras à la fête que lorsque tu auras trié tous ces grains. »

Réalisant qu’elle ne pourrait finir à temps, Tấm se mit à pleurer. Bouddha apparut et lui dit : « Place ce riz et ce paddy au milieu de la cour. » Sitôt fait, une volée de moineaux s’abattit sur les grains, et la besogne fut aussitôt achevée. Songeant qu’elle n’avait rien à se mettre, Tấm se remit alors à pleurer. Bouddha lui dit : « Va voir sous les pieds de ton lit, tu trouveras ce qu’il te faut. » Dans les quatre petits pots, elle trouva tout ce dont elle rêvait, et apparu un vrai cheval harnaché. Elle revêtit ses beaux atours et monta sur le cheval qui l’emporta 🐎.

En longeant un lac, une des ses pantoufles 🥿brodées d’or tomba à l’eau. Quelques instants plus tard, empruntant le même chemin, l’éléphant 🐘monté par le roi s’arrêta brusquement et refusa d’avancer. Intrigué, le roi ordonna de sonder les abords du lac. Une pantoufle brodée d’or lui fut alors apportée.

Émerveillé par sa petitesse, le roi jura de n’épouser que celle à qui elle appartenait. Aucune des jeunes filles présentes à la fête ne réussit à l’enfiler. Lorsque vint le tour de Tấm, son pied s’y ajusta à merveille. Elle sortit alors l’autre pantoufle d’or qu’elle avait soigneusement enveloppée. Il ne fit alors plus aucun doute qu’elle était l’élue 👸🏻…


Tấm Cám ou la Cendrillon vietnamienne (2/2)

Dans la version vietnamienne de Cendrillon, il est question du parcours initiatique d’une enfant devenant femme, et pour laquelle le mariage n’est pas une fin en soi. Ce sont les épreuves postérieures au mariage qui transformeront la petite fille timide et apeurée en une femme lucide et combative.

(Re)Découvrez la suite & fin du conte vietnamien Tấm Cám, où de nombreuses péripéties attendent encore notre héroïne… avant un dénouement beaucoup plus sombre et cruel…

Tấm Cám ou la Cendrillon vietnamienne (suite et fin)

Loin de sa sœur et de sa belle-mère, Tấm vivait heureuse dans la citadelle avec le roi. La date anniversaire de la mort de son père approchant, elle retourna dans son village pour lui préparer une offrande. Sa marâtre lui demanda de cueillir des noix d’arec pour l’autel des ancêtres.

Lorsque Tấm fut au sommet de l’aréquier, la marâtre entreprit d’en couper le tronc. « Que fais-tu en bas de l’arbre, Mère ? – Je chasse les fourmis 🐜 afin qu’elles ne te piquent pas. » Lorsque l’aréquier tomba, Tấm se noya dans l’étang voisin. La marâtre envoya alors Cám au palais prendre la place de sa sœur.

Transformée en beau loriot 🦜, Tấm retourna dans le jardin royal. Le roi entendit le chant du loriot et murmura : « Loriot, loriot, si tu es mon épouse, faufile-toi dans la manche de ma tunique. » L’oiseau quitta aussitôt son perchoir pour se faufiler dans sa manche. Désormais, jour et nuit, le doux chant du loriot, dans sa cage dorée, consolait le roi de la perte de sa bien-aimée.

Dès lors, le Roi 🤴🏻 n’accorda plus aucune attention à Cám qui s’en plaignit à sa mère. Celle-ci lui conseilla de tuer l’oiseau et de le manger. Un jour que le roi était absent, Cám tua le loriot, le mangea puis jeta ses plumes dans le jardin.

A son retour, il chercha en vain le loriot. De ses plumes, poussa un beau pêcher verdoyant 🌳; lorsque le Roi se tenait dessous, il croyait entendre la voix de Tấm. Il ne se lassait pas d’écouter le chant des feuilles, installé sur un hamac à l’ombre de son feuillage 🍃.

Une fois encore, sur les conseils de sa mère, Cám fit abattre l’arbre un jour de tempête et le transforma en un métier à tisser. Elle expliqua au roi que le vent 🌬 avait soufflé trop fort et que sur ce métier fait du bois de son arbre, elle tisserait pour lui. Lorsqu’elle s’assit au métier à tisser, elle entendit : « Cric, crac, cric, crac, tu m’as volé mon mari, je te crèverai les yeux ! » Effrayée, elle courut chez sa mère qui lui conseilla de brûler le métier à tisser et d’en disperser les cendres. Cám obéit et jeta les cendres au bord d’un chemin loin du palais. Un beau plaqueminier 🌳 y poussa, ne donnant qu’un seul fruit, une plaquemine* (trái thị) parfumée. Une vieille dame vint alors à passer et tendit son panier : « Oh plaquemine, tombe dans mon panier. Je te garderai pour l’odeur, jamais je ne te mangerai !‭ »‬ La plaquemine tomba aussitôt dans le panier.

Chaque jour, après sa journée de vente sur le marché, la vieille dame trouvait toujours, à son grand étonnement, la maison propre 🧹, du riz chaud 🍚, du thé infusé 🍵. Un jour, faisant mine de partir, elle revint sur ses pas et vit une jeune fille belle sortir du fruit. La vieille dame rentra, déchira l’écorce vide de la plaquemine et serra Tấm dans ses bras. Dès lors, telles une mère et sa fille, elles menèrent une vie paisible.

Tấm préparait chaque matin des chiques de bétel pour l’étal de la vielle dame. Un beau jour, de passage, le roi 🤴🏻s’arrêta devant l’étal de la vieille dame. Elle lui apporta du thé 🍵 et quelques chiques de bétel préparées en forme d’ailes de phénix, une forme dont seule Tấm avait le secret. Le roi demanda : « Qui a préparé ces chiques de bétel ? – C’est ma fille, Majesté. – Où est-elle ? Faites la venir ! » Le roi reconnut avec bonheur l’épouse qu’il n’avait cessé d’aimer, plus belle que jamais, et la ramena au palais. Jalouse de sa beauté, Cám lui demanda son secret de sa beauté. Tấm lui répondit : « Pour être belle, feras-tu ce que je veux ? » Cám acquiesça avec empressement. Tam fit creuser un trou profond, invita sa sœur à y descendre et la fit asperger d’eau bouillante. Son corps fut mis en jarre et salé avec de la saumure de poisson.

Tấm fit porter la jarre chez sa marâtre en prétendant que c’était un présent de Cám. La vilaine marâtre s’en régalait chaque jour. Un corbeau perché sur le toit de la maison tenta pourtant de l’avertir, mais furieuse, elle le chassa à grands cris. Elle continua de se régaler de la salaison sans se douter de rien, jusqu’au jour où, au fond de sa jarre, elle découvrit le crâne ☠️ de sa fille. Horrifiée, elle en tomba raide morte.

(*) la plaquemine (trái thị), aussi appelé kaki, est le fruit du plaqueminier